Homélie du 26ème dimanche du temps ordinaire
Abbé Jean Compazieu | 18 septembre 2021L’Esprit souffle où il veut
Nous avons pu être surpris et même choqués par la violence des paroles de Jésus. C’est vrai qu’il nous demande de couper et de trancher. En réalité, il ne s’agit pas de mutilation. Ce qui nous est demandé, c’est de rompre d’une manière radicale avec les habitudes qui nous entraînent au péché.
Dans l’Évangile de ce jour, Jésus nous donne trois exemples : il nous parle d’abord de la main : elle est faite pour recevoir les dons de Dieu et les partager. La main qui entraîne au péché, c’est celle qui accumule les richesses au détriment des plus pauvres. Elle n’hésite pas à frapper pour en avoir encore plus. C’est cette soif de richesses qui peut entraîner la chute d’un petit ; c’est extrêmement grave, surtout quand ça vient d’un chrétien.
Le pied, c’est l’indépendance et l’autonomie ; il nous permet d’aller et venir. Tout l’Évangile que Dieu nous appelle tous à marcher à sa suite. Il est le Chemin, la Vérité et la Vie. C’est par lui que nous allons vers le Père. On peut pécher avec le pied quand on court vers le mal et qu’on y entraîne les autres. Pécher avec le pied, c’est se détourner de Dieu et s’engager sur des chemins de perdition.
Le péché de l’œil peut prendre diverses formes. L’œil mauvais, c’est celui qui ne voit que le mal chez les autres. Il a une attitude méprisante et orgueilleuse. De plus, il ne voit pas le pauvre Lazare au pied de sa porte. Son péché, c’est de ne voir que lui-même et ses intérêts personnels.
C’est exactement cela que dénonce l’apôtre Saint Jacques dans la deuxième lecture. Ses paroles sont très violentes. Il s’adresse à ceux qui accumulent pour eux richesses et argent. Il s’en prend à ceux qui exploitent les travailleurs qui sont sous leurs ordres. Son but n’est pas de les enfoncer dans leur péché mais de les appeler à en sortir. Ces richesses qu’ils empilent sont pourries ; elles ne font que fausser les relations de fraternité et de justice. Si Dieu nous donne plus de biens, c’est pour faire plus d’heureux. Ce qui fait la valeur d’une vie, c’est l’amour. C’est à cela que nous serons jugés.
Cet amour que nous sommes appelés à vivre trouve sa source en Dieu. C’est vrai, Dieu est amour. Cette révélation, nous la trouvons tout au long de la Bible, Ancien et Nouveau Testament. Il ne s’agit pas d’un amour tiède, mièvre ou romantique qui nous permettrait de nous installer dans une vie bien confortable. En fait, la Bible nous montre que l’amour de Dieu pour chacun de nous est passionné. C’est un feu dévorant, un amour qui passe par la mort du prophète, la mort à soi-même, la mort sur la croix.
Pour nous chrétiens, l’image de l’amour de Dieu c’est la croix. On a peut-être perdu de vue la flamme dévorante de cet amour dans nos vies chrétiennes. L’amour vrai ne se vit pas à moitié ni aux trois quarts. Il prend l’homme dans sa totalité.
Cet amour de Dieu total et sans limite explique la radicalité de l’Évangile de ce jour : il n’est pas réservé à quelques privilégiés comme les 70 anciens du livre des Nombres (1ère lecture). L’Esprit de Dieu est donné à tous sans distinction de religion. Tous peuvent vivre de l’amour de Dieu et partager sa vie. Mais nous ne pouvons entrer dans cette relation d’amour qu’en acceptant une transformation radicale de notre vie, en changeant le regard que nous portons sur nous-mêmes et sur les autres. Nous sommes invités à laisser derrière nous notre ancienne vie pour en vivre une nouvelle. Ce n’est qu’en rejetant l’égoïsme, l’orgueil, la convoitise et la violence que nous pourrons vivre de l’amour et accéder à l’amour
L’amour de Dieu pour chacun de nous est un feu violent qui nous purifie et nous libère des peurs et des angoisses ; il vient nous ouvrir à la liberté et à la vie ; il nous ouvre aux autres ; il nous permet d’être des hommes et des femmes debout. La violence de l’Évangile d’aujourd’hui, celle de Jacques, celle de l’Esprit de Dieu, sont là pour nous réveiller et rallumer en nous la flamme de l’amour et de la vie. Cette violence est nécessaire et salutaire car elle donne accès au bonheur et à la joie.
Pour entrer dans cette vie, pour vivre de l’amour, il faut laisser derrière soi peut-être un pied, un œil, un bras ; il faut renoncer à des choses qui nous paraissent fondamentales mais qui nous empêchent de vivre et d’être heureux. Alors, nous serons libérés d’un grand poids et nous pourrons cheminer joyeusement au côté de Jésus.
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Sources : Revues Feu Nouveau et Fiches dominicales – Homélies pour l’année B (Amédée Brunot) – Au service de la Parole (Bernard Prévost – Guide Emmaüs des dimanches et fêtes (JP Bagot) Commentaires de Sœur Claire – François selon Saint Marc – Homélies des prochains dimanches (Diocèse de Blois)
Le message de l’Évangile de ce dimanche pourrait être celui de l’œcuménisme et du respect de la diversité de pensées et d’actions. Les textes liturgiques nous présentent deux cas d’intolérance. Le livre des Nombres relate un événement qui s’est produit dans le camp du Peuple de Dieu : Moïse forme une liste de ‘soixante-dix anciens du peuple’ et les convoque à la Tente de la Rencontre, mais deux d’entre eux, Eldad et Médad, manquent à l’appel pour manifester leur esprit d’indépendance. Josué, trouvant anormal que ceux-là se conduisent comme s’ils avaient reçu l’Esprit de Dieu, demande à Moïse de les empêcher de ‘prophétiser’. « Mais Moïse lui dit : ‘Serais-tu jaloux pour moi ? Ah ! Si le Seigneur pouvait faire de tout son peuple un peuple de prophètes ! Si le Seigneur pouvait mettre son esprit sur eux !’ » (Nombres 11:29) Moïse se réjouit de voir l’Esprit du Seigneur s’emparer de deux des leurs. L’Évangile nous rapporte la remarque indignée de Jean, scandalisé de voir quelqu’un qui ne fait pas partie des compagnons les plus proches du Maître accomplir des merveilles en son nom : « Maître, nous avons vu quelqu’un expulser les démons en ton nom ; nous l’en avons empêché, car il n’est pas de ceux qui nous suivent. » (Mc 9:38) Mais, Jésus le reprend : « Ne l’en empêchez pas, car celui qui fait un miracle en mon nom ne peut pas, aussitôt après, mal parler de moi ; celui qui n’est pas contre nous est pour nous. » (Mc 9:39-40) Ce disant, Il invite ses disciples à une ouverture d’esprit envers ceux qui ne font pas partie des leurs.
L’Esprit de Dieu est sans frontières. Il agit en tout homme. Son Souffle se manifeste dans l’œuvre de tous ceux qui témoignent par leur vie de l’Amour de Dieu. Jésus l’a expliqué à Nicodème : « Le vent souffle où il veut : tu entends sa voix, mais tu ne sais ni d’où il vient ni où il va. Il en est ainsi pour qui est né du souffle de l’Esprit. » (Jn 3:8) La voix de Dieu est multiple et diverse. Elle retentit au plus profond du cœur de chacun et ne se laisse pas enfermée exclusivement dans les pensées des experts. L’évangélisation n’est pas réservée qu’à une élite, c’est l’affaire de tous. Personne n’en a le monopole ! Pourtant, encore aujourd’hui, la tentation est bien présente chez certains de se comporter en seuls dépositaires de la Parole de Dieu, du moins de son interprétation. Le témoignage pertinent d’un simple croyant peut très bien avoir un impact positif dans la vie chrétienne de chacun. Et parfois même, ce sont des ‘païens’ qui nous réveillent, ceux qui n’ont jamais entendu parler de Jésus ou qui n’ont pas pu saisir le véritable message de l’Évangile. Alors, gardons-nous de juger !
« Celui qui n’est pas contre nous est pour nous. » (Mc 9:40) Jésus nous invite à élargir nos horizons et à reconnaître, par-delà les barrières confessionnelles, les prophètes de notre temps. Il nous conseille d’ouvrir largement l’esprit à l’écoute de tous ceux qui sont différents de nous pour découvrir la justesse de leur message. Il nous exhorte à réfléchir sur nos préjugés et nos rejets des trajectoires différentes de la nôtre. L’Esprit de Dieu parle au travers des hommes ou des femmes, qu’ils soient chrétiens ou non. Toute personne qui se met au service de l’humanité est artisan du Royaume des Cieux. Pour saint Paul, un amour véritable manifeste l’Esprit de Dieu. « Voici le fruit de l’Esprit : amour, joie, paix, patience, bonté, bienveillance, fidélité, douceur et maîtrise de soi. En ces domaines, la Loi n’intervient pas. » (Galates 5:22-23) L’Amour ignore la frontière des religions. Nombreux sont des personnes qui font un travail exceptionnel dans un grand esprit de fraternité en dehors de toute idéologie religieuse. Force est de constater que des hommes et des femmes de tout âge, par leur action ou leur témoignage, contribuent à répandre cet Amour à travers le monde. Ils luttent contre le mal, contre l’injustice… Nous décelons dans leurs initiatives la trace de l’enseignement du Christ. Nous devons respecter leur cheminement et laisser mûrir l’œuvre de Dieu en eux. Ne nous prétendons pas être les seuls détenteurs de l’Esprit. Mais réjouissons-nous que ce même Esprit soit donné à d’autres, bien au-delà des frontières de nos communautés.
Le chemin spirituel n’est pas une voie unique. Chacun avance à son rythme, conscient d’être accompagné par la Voix intérieure qui nous guide pour donner le meilleur de nous-mêmes ! C’est ce Souffle qu’a retrouvé le Concile Vatican II pour parler des religions non chrétiennes. Dialoguer pour comprendre et apprendre ce qui se fait ailleurs, nous serons émerveillés et enrichis des perles de spiritualité d’autres personnes qui ne sont pas de la même confession que nous ! Le vrai Amour, c’est notre meilleur guide et c’est aussi la seule boussole qui nous mène vers Dieu. « Je vous donne un commandement nouveau : Aimez-vous les uns les autres; comme je vous ai aimés, vous aussi, aimez-vous les uns les autres. À ceci tous connaîtront que vous êtes mes disciples. » (Jn 13:34)
À travers le message de l’Évangile d’aujourd’hui, Jésus invite chacun de nous à devenir le messager de Dieu pour nos contemporains. Il nous encourage à exprimer notre conviction, si modeste soit-elle, pour témoigner notre foi. « Que votre lumière brille devant les hommes : alors, voyant ce que vous faites de bien, ils rendront gloire à votre Père qui est aux cieux. » (Mt 5:16)
Nguyễn Thế Cường Jacques
Notre Église a des sérieuses difficultés. Il est des gens qui se croient tout permis même pour juger les autres. Ce sont eux qui déterminent si telle ou telle personne est dans le vrai. ” Esprit Saint et nous, avons décidé”. Quelle aberration !!!
L’Église c’est nous. Le conversion doit commencer par vous et moi.